"La première moitié du XXe siècle, en Russie d'abord puis dans l'émigration russe, a été marquée par l'essor d'une pensée chrétienne souvent prophétique, à la rencontre de l'Occident et de l'Orient chrétiens, de l'Eglise et de la liberté. Un des témoins les plus importants de ce renouveau qui reprend aujourd'hui en URSS, fut sans conteste Nicolas Berdiaev, né à Kiev en 1874, mort à Clamart en 1948. Il a tenté, à la suite de Dostoïevski, en réponse à Marx et à Nietzsche, de rendre compte de la grandeur de l'homme telle que l'exalte la modernité : non pas contre Dieu toutefois, mais dans la " divino-humanité " christique, espace de l'Esprit et de la liberté. De l'esclavage et de la liberté de l'homme constitue la synthèse la plus dépouillée, la plus mûrie, d'une spirititualité, d'une éthique, aussi paradoxale que le Dieu incarné et crucifié du christianisme. Tout est centré sur le thème de la personne irréductible, inconceptualisable, mouvement de dépassement et de communion. Dans une série de développements antinomiques, Berdiaev fait surgir le visage divin de l'homme affronté aux idoles de la philosophie, de sociétés " objectivées ", de l'Etat, de la révolution ou de la sexualité. Il suggère un " eschatologisme actif " où l'homme, retrouvant en Christ sa vocation de créateur créé, anticipe et prépare la transfiguration universelle, affrontant illusions, pesanteurs et tyrannies pour faire flamboyer la liberté".