Né à la fin des années 1840, Badoma est vendu comme esclave à des commerçants yarsé ou a dû fuir les siens, selon les versions. Du pays des Gourounsi, dans l'actuel Burkina Faso, Badoma, devenu marchand yarsé, se retrouve dans le Yatenga, en pays mossi ravagé par des rivalités entre prétendants au trône et par les colonnes de conquêtes militaires des lieutenants Voulet et Chanoine. On le découvre sur les pistes caravanières de marchands d'esclaves et de quincaillerie dans toute la région Ouest africaine et dans le Maghreb. De retour forcé dans sa région natale en 1896, il s'adonne subtilement au jeu de pouvoir d'où son surnom de Nassar Badoma et sa transformation en éminence grise. A travers son histoire faite de contradictions et de rebondissements, où il doit se livrer sans se confier entièrement on découvre un génie qui va regrouper différents clans sous l'autorité d'un seul chef, tout en gardant en réalité les rênes du pouvoir donné par l'administration coloniale. L'auteur évoque son action dans l'installation des Pères Blancs, dans le choc des croyances religieuses (christianisme, apostasies, polygamie, mariage forcé ou d'amour, liens sociaux et monde de l'après-mort, peur de l'ennui au paradis de Jésus, etc.). A travers cet ouvrage, Paul Jean permet de connaître davantage Nassar Badoma et surtout de montrer les raisons pour lesquelles son prénom reste gravé dans la mémoire collective, même si très peu de personnes savent son action dans le regroupement des Lyéla sous une seule autorité.