"La guerre survint à la fin de ma première année de philosophie - et, du premier coup, je compris que je devais abolir le passé en moi pour me consacrer entièrement à l'accomplissement de ce que je considérais être mon premier devoir d'homme avec la suprême incertitude qui m'imposait la pensée : à quoi bon se soucier du passé, de l'avenir, quand l'on ne sait plus si l'on va pouvoir durer. En arrivant au front je n'avais qu'une pensée : pouvoir servir - enfin ! Servir à l'armée belge signifiait mener une vie de bête dans la paille et dans la boue, jour par jour, une interminable corvée faite de travaux forcés, de jours de garde aux tranchées, de jours de repos dans des cantonnements de fortune, de l'absence totale de tout stimulant, de toute impression de faire vraiment quelque chose, de servir à quoi que ce soit".