Les modes de fonctionnement et les structures internes des sociétés d'Asie centrale - prise au sens large puisque la présente étude traite aussi bien de la Mongolie que de l'Ouzbékistan, en passant par la République de Touva en Sibérie - demeurent largement méconnus en Occident où les analystes décrivent encore exclusivement ces systèmes en des termes à connotation négative tels que " clans ", " régionalisme ", " népotisme " ou " corruption ". Réunissant les travaux d'anthropologues, de sociologues, de politistes et d'historiens, cet ouvrage présente plusieurs types de réseaux sociétaux qui, selon un long continuum, vont des plus complets, assimilables à des organisations au sens sociologique du terme, à d'autres, strictement personnels et égocentrés, en passant par toute une série de types intermédiaires, typiquement centrasiatiques, dans lesquels se mêlent relations personnelles, relations de parenté et relations d'affaires. Résultant d'enquêtes menées selon le principe de l'observation participante, étalées sur plusieurs années, ces études montrent l'étonnante plasticité de ces réseaux qui, malgré les profonds bouleversements survenus en Asie centrale durant ces deux dernières décennies, ont su s'adapter aux nouvelles exigences nées de l'effondrement de l'Union soviétique. Dépourvus de limites précises, souvent difficiles à circonscrire, ces réseaux sont le reflet des modes de gouvernance, des systèmes de pensée politique, des solidarités traditionnelles et des méthodes d'appropriation du pouvoir et surtout d'acquisition de prestige, ce bien symbolique tant recherché par les populations de cette région.