De toutes les pièces de Racine, Andromaque a été la plus lue et la plus représentée. A la fois légendaire et romanesque, idéaliste et passionnelle, ludique et tragique, c'est en effet la plus séduisante, et celle qui permet les interprétations les plus diverses. C'est aussi la plus théâtrale : tombés de la grandeur héroïque dans l'impuissance tragique, le fils d'Achille, le fils d'Agamemnon et la fille d'Hélène masquent cette déchéance qui les vexe en multipliant déguisements, parades et provocations. Mais la passion qui les emporte malgré eux signifie qu'ils ne trouvent plus en eux-mêmes leur propre raison d'être : c'est désormais un idéal inaccessible, figuré par celui ou celle qui les refuse, et notamment par Andromaque. La veuve du vaincu de l'affrontement héroïque est devenue, par le renversement des valeurs, la figure idéale de l'ère tragique, parce qu'elle n'appartient plus tout à fait au monde des humains. Cet ouvrage inscrit la pièce dans l'anthropologie et la culture du XVIIe siècle, fait le point des connaissances, présente les interprétations successives et les mises en scène récentes.