Considéré comme "l'homme le plus spirituellement mal élevé", Alphonse Karr (1808-1890) est un de ces rares écrivains dont l'oeuvre paraît être une ponctuation de leur vie. Sa volupté à écrire était telle, qu'il multiplia les contributions aux journaux et les ouvrages où son humour à la pointe sèche pouvait s'exercer en toute impunité. Un temps rédacteur en chef du Figaro, ce poète et romancier fut aussi marin, pêcheur, pamphlétaire, botaniste et jardinier, tout en cultivant l'amitié de Hugo, Lamartine, Dumas, Sand, Balzac, Nerval, Gautier, etc. C'est cette personnalité que fait revivre Charles-Armand Klein dans une biographie qui restitue toutes les facettes de cet humaniste sarcastique. Alphonse Karr, jetant à la volée ses mots d'esprit, se protégeait contre tous les égarements d'une société qui, déjà, sacrifiait l'Homme et la nature au culte du "progrès". "Un préjugé est comme une pierre jetée au milieu d'un bassin, elle produit un cercle qui va s'élargissant jusqu'aux extrémités", disait cet épicurien à la lucidité tempérée par l'ironie dont les idées et les propos, étonnamment modernes, répondaient à l'avance aux préoccupations d'aujourd'hui.