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Dégrader, c'est condamner la personne à perdre sa dignité. L'enquête exceptionnelle de Corinne Rostaing, fruit de trente années de recherche, notamment dans les prisons de femmes, révèle combien, aujourd'hui en France, la détention, malgré les continuelles améliorations, dégrade. Et cet effet ne se limite pas à la durée de l'incarcération ni aux seules personnes détenues.
Assurément, les conditions diffèrent, selon que la personne est incarcérée en maison d'arrêt pour le prévenu (en attente de jugement ou de jugement définitif) ou le condamné à une courte peine, en centre de détention pour les condamnés à des peines plus longues (moins de dix ans généralement) ou en maison centrale pour les condamnés à de longues peines ou nécessitant une surveillance particulière. Mais l'effet de l'enfermement, expérience totale et spécifique, est le même : l'espace limité, l'organisation bureaucratique, la vie artificielle, l'isolement et la promiscuité, l'ennui.
L'incarcération provoque une remise en cause de l'identité et constitue une épreuve morale sans équivalent. Face à la mission de retrancher l'individu de la société, que pèse la mission de réinsertion sociale, du point de vue de l'institution et des personnes incarcérées ? Comment les sortants peuvent-ils s'en sortir ? La prison, réduite à un rôle de gardiennage des individus, ressemble davantage, pour les 200 détenus qui en sortent chaque jour, à une voie sans issue qu'à un nouveau point de départ.
Cet ouvrage formule la question essentielle : quel sens peut-on donner aujourd'hui à la peine et à la prison dans la société démocratique ?