Les valeurs les plus consacrées ont leur histoire. Ce « Tombeau de Léonard de Vinci » rassemble et analyse les textes qui à l'époque des Décadents... > Lire la suite
Les valeurs les plus consacrées ont leur histoire. Ce « Tombeau de Léonard de Vinci » rassemble et analyse les textes qui à l'époque des Décadents et des Symbolistes ont contribué à faire de Léonard et de la Joconde les modèles de référence de la culture picturale occidentale. À un moment où les sciences et les techniques occupent une place dans la civilisation moderne qui interroge nécessairement la capacité des pratiques culturelles traditionnelles, Léonard de Vinci, esprit universel et peintre, apparaît comme une figure mythique de conciliation des antagonismes. À un moment où la peinture « moderne » et la photographie mettent en crise la fonction « réaliste » du tableau, la Joconde, un portrait, devient le plus beau tableau du monde. Deux absolus d'autant plus mythiques que le réel est plus irrépressiblement éclaté et la prétention interprétative totalisante des élites plus désespérément vaine. Le culte que le xixe siècle inaugure, apparaît ainsi comme la plus haute dénégation de l'impuissance de la culture telle que nous la vivons encore. Le propos n'est pas technique, il ne vise pas la « vérité », par quelque voie qu'on prétende la constituer, de Léonard et de son ouvre. Il ne s'agit que de décrire un processus complexe d'élaboration des représentations culturelles françaises en matière de peinture. Cela implique que les textes occupent le devant de la scène et que la critique d'art soit prise pour ce qu'elle est : l'organisation d'une croyance et un exercice d'écriture. La critique communique donc davantage avec la littérature qu'avec la connaissance, d'où la coexistence ici de textes qui appartiennent aussi bien à l'essai qu'au roman et qui sont produits par Taine, Michelet, Barrés, Valéry, Laforgue, Péladan... mais aussi, le vincisme français convoquant l'Europe, par Walter Pater, D'Annunzio ou Merejkovsky.