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La murette ne résista pas à la charge du véhicule emballé, mais elle lui imposa néanmoins un net ralentissement ; si bien que, quand il pénétra dans la cour de l'école, après avoir failli chavirer à plusieurs reprises, l'officier en était revenu, littéralement ventre à terre, à une dizaine de mètres. Un cri d'effroi monta dans la nuit, vraisemblablement celui d'un factionnaire posté sous le préau où stationnaient les deux blindés. A la même seconde, Cagnard, stoppant sa course devant l'obstacle éventré, dégoupillait une grenade et l'expédiait de toutes ses forces, d'un geste sûr, au cul du camion. L'explosion tonna, au but, criblant d'éclats l'arrière de la citerne d'où l'essence jaillit en véritable averse. Succédant au flash orangé de la déflagration, une haute gerbe de flammes s'épanouit dans un « vlouff » retentissant, tandis que la coulée de carburant répandu au cours du trajet, s'enflammait telle une queue de comète. Le camion explosait à son tour, formidable volcan semant l'enfer autour de lui. Soufflés par la violence de l'onde de choc, les deux bâtiments les plus proches, légères constructions aux murs de torchis, s'effondrèrent comme de vulgaires châteaux de cartes. La toiture de tôles du préau s'envola, livrant les deux automitrailleuses à l'averse incandescente, cependant qu'à cinquante mètres à la ronde, les paillotes, soumises au même traitement, se transformaient en torches ardentes. Cagnard n'avait eu que le temps de faire un bond en arrière, pour éviter la soudaine haie de flammes qui matérialisait à présent la course folle du camion au flanc du tertre. Sans s'attarder dans la contemplation de son ouvre, il prit rapidement le large, se guidant, à distance respectueuse sur le tracé incandescent : repère infaillible pour rallier le point où devaient l'attendre ses compagnons.