L'écrivain des paroxysmes, l'homme de la fureur et du cri n'était pas allé au bout de ses épreuves. Voici qu'un jour lui est portée l'estocade de... > Lire la suite
L'écrivain des paroxysmes, l'homme de la fureur et du cri n'était pas allé au bout de ses épreuves. Voici qu'un jour lui est portée l'estocade de l'impuissance à écrire. Ce fou des mots est trahi par les mots. C'est littéralement plus qu'il n'en peut supporter. Il tombe dans l'innommable comme dans le dernier cercle de son enfer. Au bord de la mort, il se bat avec le démon rebelle qui, tant bien que mal, lui avait permis de vivre. Un amour ne résiste pas à cette obsession et la femme qu'il tente de retenir dans l'ailleurs-de l'érotisme finit, lassée, par le quitter. C'est le point ultime de la crise qui, cette fois, paraît sans retour. Un livre en sort pourtant parce qu'il a été préféré au néant. Jamais mieux que dans ce fleuve de feu n'auront été cernés le désespoir et le salut que, pour un écrivain, peut signifier l'acte d'écrire. C'est le moment d'une expérience limite, où les qualités et les défauts d'un auteur sont portés à l'incandescence. Etrange livre, d'une démence grandiose, où un homme se bat avec les mots comme Jacob avec l'Ange et sort de ce duel à la fois brisé et triomphant. Cette longue plainte furieuse, toute en jaillissements saccadés, comme sort le sang d'une artère coupée, a la beauté convulsive que louait Baudelaire. Paul-Jean Franceschini.