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Ce livre représente une tentative désespérée pour transfigurer l'existence vulgaire en un mythe fabuleux. Entre la réalité passionnément vécue et une fantasmagorie passionnément composée, Charles Pascarel n'a pas voulu choisir. Ou plutôt, tout est pour lui dans l'opération alchimique qui transmute le quotidien pour le faire entrer dans la légende. Le quotidien : à partir de sa chambre de Montrouge, abandonné de sa femme comme autrefois humilié par sa mère, l'homme se voue aux hasards des rencontres, des ponts de la Seine aux abattoirs de la Villette. A force d'avoir froid et faim et d'être seul, à force de torturer son langage et sa plume, il forge en lui, autour de lui, une étrange et fascinante légende. Montreur d'ours, proxénète, artiste, chevalier, jongleur, poète errant, trousseur de pucelles, ermite, ce démiurge invente et incarne tous les rêves qui le tourmentent. Car il voudrait pouvoir se quitter, partir vers Chartres, vers les trésors fantastiques, ou vers Die, vers la Comtesse lointaine. Il s'agit de lui-même et de son salut. Cet homme est poursuivi par le génie de sa propre genèse : "Je suis ma propre mère - Je me mange - Je connaîtrai ma puissance quand je serai l'enfant de moi-même." Effectivement, Pascarel n'écrit pas, il mange. Et cette consommation va du mets le plus fin à la plus simple ordure. L'ouvre nourrit le poète - le poète se donne en pâture à son ouvre. Il faut que l'un décline afin que l'autre croisse. Tel est le canon de cette cérémonie sanglante. Sacre ou massacre du printemps ? A la tendresse émerveillée de certaines pages répondent, ailleurs, les blasphèmes et les excès. "J'ai lié le lys à l'humus, les étrons aux valses de Vienne", dit l'auteur. De peur de s'y méprendre il faut rapporter tout ce qui dans ce chant est violence destructrice à la pureté d'un amour blessé. Il faut également espérer que, depuis Victor Hugo, il n'y a en France, "plus de mots sénateurs, plus de mots roturiers". Un public d'exception saura reconnaître dans cette ouvre une sorte de "Génie du Paganisme".