Voici venu le temps de la mémoire. Depuis bientôt quarante ans, des témoins prestigieux - à commencer par le Colonel Rémy dont la « lettre préface »... > Lire la suite
Voici venu le temps de la mémoire. Depuis bientôt quarante ans, des témoins prestigieux - à commencer par le Colonel Rémy dont la « lettre préface » convie, avec une amicale et simple chaleur, à la lecture de ce récit - ont tracé les grandes avenues de la Résistance française à l'occupant nazi. Il reste aujourd'hui à affiner ce réseau de voies - et de voix - connues de tous, en donnant la parole aux acteurs anonymes qui ont frayé les sentiers sans lesquels les avenues glorieuses n'auraient pu conduire tout un peuple à la reconquête de sa liberté. Ces acteurs n'ont jamais prétendu au titre de héros. Ils ont payé cependant un lourd tribut à l'angoisse, à la violence, à la torture même, et la mort était parfois au bout du sentier. Le témoignage de Lucienne Blandeau est émouvant, car il touche et convainc par son authenticité ; il est d'une admirable concision, demeurant, dans sa ligne naïve, au cour même de la réalité qu'il décrit. Ce témoignage est clair, comme le nom de la jeune fille sous les traits de laquelle l'auteur revit pour nous son adolescence, sa naissance à sa vie de femme, au pays exaltant et terrible de la Résistance. Ce pays est géographiquement Angers, mais ce pourrait être une autre ville de la France occupée ; c'est aussi les Mauges, la plus paisible des campagnes françaises, si bien accordée au cours immuable des saisons, soudain bouleversée par les orages, alors sans cesse menaçants, de la répression nazie. Avoir 20 ans en 1943. Quelle extraordinaire aventure quand ces 20 ans ne veulent ni se résigner ni se soumettre ! Et pourtant la vie est là ; elle continue avec ses rêves, ses élans, ses illusions. On a dit de ce temps qu'il fut celui du chagrin et de la pitié ; nous le découvrons ici sous les traits de la colère et de la tendresse, au sein d'une famille de résistants que la guerre, un jour, est venue provoquer et qu'elle a bientôt cruellement déchirée. Mais la désespérance même aura été impuissante à tuer en Claire (Lucienne) le besoin d'aimer.