Lecteurs, voyants donc (je ne parle pas des aveugles déchiffrant du bout des doigts), vous connaissez intimement la nécessité de lieux, de récits,... > Lire la suite
Lecteurs, voyants donc (je ne parle pas des aveugles déchiffrant du bout des doigts), vous connaissez intimement la nécessité de lieux, de récits, de catalogue. Vous laissant rouler dans du réel, pour purger le mal que vous avez déclenché dans votre piété naïve de voir quelque chose figurée à tout prix, et l'adorer. Vous honorez l'effort de coucher sur un tissu les formes de mannequins que sont les corps - ou d'en recueillir quelle empreinte crue divine. Mais, au livre, vous savez, le séjour plan est impossible. L'imprimerie s'appliquerait sans garantir jamais que la peau ne soit arrachée au mannequin ou au dieu. Enlevée pour présenter un à-plat, alors qu'elle est le milieu non réversible du volume. Vous vous retournez, vous-mêmes, à cette perspective, dans le sommeil, incapables de choisir sous quel angle prendre lecture - pas même celui, menacé par l'obscurité, du contact. Juste avant l'éveil : car là, vous vous rappelez : "Le sujet du livre se détachait de moi, j'étais libre de m'y appliquer ou non." (Marcel Proust) Ce détachement (ici serait un jour ?) chez Alain Degange n'élimine pas "la nuit sous le linge... et l'autre sens des chairs venues moins tôt" - mais corrige, sans cesse, au lieu de l'ensevelir dans l'après-coup, votre lecture. Courage, en somme : "c'est au réveil et l'oil n'a plus rien à percer".