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Prato, petite ville toscane proche de Florence, est l'un des prototypes les plus connus des districts industriels italiens qui ont soutenu le dynamisme économique de la Péninsule dans l'après-guerre grâce à leur réseau dense et diversifié de micro-entreprises. Economistes et sociologues se sont naturellement intéressés à cette organisation industrielle alternative au modèle fordiste qui continue à vivifier l'économie italienne à l'heure de la globalisation. Mais les historiens de l'industrialisation, qui ont longtemps insisté sur le retard de la Péninsule par rapport au modèle anglais, ont eu tendance à envisager l'éclosion rapide après 1945 d'une nouvelle industrie dans une zone considérée jusque-là archaïque comme un « miracle ». Or, le miracle a une histoire qui le rend à la fois possible mais aussi un peu moins surprenant. Grâce à une enquête fondée sur les archives des corporations et de l'Etat, les papiers de notaires, les correspondances privées, ce livre retrace le parcours industriel de la ville à partir du nouvel élan des activités textiles au 18e siècle. Acteurs du dynamisme, les entrepreneurs pratésiens : aidés plus que freinés dans l'organisation de la production et du territoire par les institutions locales, ils réussissent à mobiliser une main d'ouvre qui ne rechigne pas trop à changer de fabrication. Pour faire face aux multiples incertitudes de leur situation, grands et petits fabricants, artisans de la finition sont en effet à la recherche constante de nouveaux marchés et sont prompts pour cela à varier leurs productions : aptes à faire de la qualité, ils sont décidés à produire de tout pourvu qu'ils trouvent acheteurs. Prêts à adopter l'innovation sans renier la tradition dans la gestion des entreprises comme dans les modes de production, espionnant sans relâche et copiant sans vergogne, ces entrepreneurs sont enclins au progrès technique tout en reconnaissant les vertus du bricolage. C'est ce patrimoine d'expériences individuelles et collectives, ce mélange constant de novations, de conformismes et d'initiatives caractéristiques du bricolage permanent de la ville entre 18e et 19e siècle que retrace ce livre. On y retrouve également les raisons d'entreprendre de ce groupe d'hommes, de femmes, de familles qui a construit un territoire manufacturier complexe fondé sur le dialogue constant entre ville et campagnes, qui a permis à la graine du district actuel de germer et fait « qu'à Prato l'étoffe pousse de terre, que l'on peut planter une chemise, ou semer une veste, qu'il y a des arbres de pantalons, des plantes de costumes » (Roberto Begnini).