Hokkaido, la grande île du Nord de l'archipel nippon, offre les seuls paysages de notre planète où l'on puisse voir des rizières devant une côte... > Lire la suite
Hokkaido, la grande île du Nord de l'archipel nippon, offre les seuls paysages de notre planète où l'on puisse voir des rizières devant une côte que la banquise vient clore en hiver. Les rizières sont celles que les paysans japonais, immigrés depuis Meiji, ont aménagées dans cette île auparavant couverte des sapinaies et des tourbières de la grande forêt boréale. La banquise est celle de la mer d'Okhotsk, ce nom aux résonances polaires, sur les rivages de laquelle les peuples du Nord chassaient le phoque et la loutre marine. La rizière et la banquise : la confrontation de ces deux images traduit l'une des plus curieuses aventures écologiques de l'humanité. À la fin du XIXe siècle, une société de l'Asie des Moussons, aux assises entées sur la culture d'une plante d'origine tropicale, le riz, entreprend de coloniser une île de climat tempéré aux hivers froids, dont la végétation naturelle s'apparente à celle de la Suède. Le résultat : les rizières les plus vastes et les productives du Japon, avec des rendements quadruples de ceux de l'Inde ; mais aussi : des structures agraires décisivement plus amples que la moyenne, des agriculteurs plus intégrés dans les circuits économiques que leurs collègues du vieux pays ; enfin et surtout, une gamme de comportements qui détonnent dans la société japonaise. Bref, la colonisation de Hokkaido ne s'est nullement bornée à reproduire les assises écologiques de la civilisation japonaise dans un milieu différent ; elle les a aussi modifiées, et avec elles la société. Aucun autre ouvrage n'existe à l'heure actuelle sur le sujet. Augustin Berque, géographe et japonisant, appuie son analyse sur une connaissance parfaite du Japon.