Revendiquer la mémoire, signifie s'insérer dans une mémoire plus vaste, plus profonde. Autrement dit collective, donc éternelle, bien qu'enfouie dans... > Lire la suite
Revendiquer la mémoire, signifie s'insérer dans une mémoire plus vaste, plus profonde. Autrement dit collective, donc éternelle, bien qu'enfouie dans les profondeurs des êtres. C'est que la mémoire oubliée a son propre langage, ses propres interdits, son propre paysage, et puise à des sources anciennes. Voilà ce que, en interpellant directement le lecteur, Guy Suarès tente de lui communiquer. Appelé au chevet de son père mourant en Argentine, un homme encore anonyme s'arrache à son milieu pour plonger dans ses souvenirs, dont le sens secret et sacré lui échappe. Du coup, il se retrouve dans un temps enrichi, rendu intense et sonore. Les haines, les séparations, les rancunes s'estompent : redevenu enfant - et juif - le héros assume son mystère d'homme face à celui de l'histoire. Qu'est-ce que l'histoire, finalement, sinon la transmission d'une mémoire vivante et agissante ? Mais il existe une autre mémoire, qui évolue de l'autre côté de l'histoire : faite de silence et d'attente, c'est la mémoire oubliée. La retrouver est difficile, la raconter l'est sept fois davantage. Et ce récit, à la fois vécu et poétique, fort, beau et passionné, est un éloge de cette mémoire. La nôtre.