On sait que Bernanos a écrit « Dialogues des Carmélites » pour un scénario du R. P. Bruckberger, d'après une nouvelle de Mme Gertrude Von Le Fort,... > Lire la suite
On sait que Bernanos a écrit « Dialogues des Carmélites » pour un scénario du R. P. Bruckberger, d'après une nouvelle de Mme Gertrude Von Le Fort, « La Dernière à l'échafaud, » qui elle-même s'inspirait d'un fait historique : l'exécution des Carmélites de Compiègne sous la Terreur. Ce qu'on sait moins, c'est ce qui appartient en propre à Bernanos dans cette genèse exceptionnelle d'un chef-d'ouvre tributaire de divers apports et principalement de celui de la romancière allemande.
Grâce à S. Meredith Murray, on est désormais à même d'en juger. Après une scrupuleuse vérification des données matérielles, commande, contrat, manuscrit, etc., elle se livre à une étude méthodique : analyse de « La Dernière à l'échafaud, » confrontation des personnages, des faits et des dates de la nouvelle avec ceux de l'histoire réelle, examen des transformations dramatiques que le scénario a imposées à un récit psychologique, mise en relief des libertés que Bernanos a prises avec ce scénario dont il plia les suggestions aux convenances de son génie personnel.
A l'égard de Mme Gertrude Von Le Fort et sans diminuer du tout, bien au contraire, sa création, elle établit, textes à l'appui, que Bernanos a opéré une « recréation » originale, non seulement par l'appropriation de certains thèmes de « La Dernière à l'échafaud » à l'ensemble de son ouvre, mais encore et surtout par l'introduction de thèmes essentiellement bernanosiens, tels que l'échange des morts entre la Prieure de Croissy et Blanche de la Force, la notion de l'honneur, l'enfance, la pauvreté, etc.
Cette étude critique débouche sur une pénétrante saisie du testament spirituel de Bernanos. Modèle d'équité et de sérénité, elle apparaîtra décisive et permettra aux nombreux lecteurs et spectateurs de « Dialogues des Carmélites » d'y voir plus clair dans leur admiration.