La notion de sanction convoque en droit un acte unilatéral approbateur ou désapprobateur, relevant de l'exercice d'un pouvoir institué chargé de récompenser... > Lire la suite
La notion de sanction convoque en droit un acte unilatéral approbateur ou désapprobateur, relevant de l'exercice d'un pouvoir institué chargé de récompenser ou, plus souvent, de punir. Elle est probablement une des plus floues du droit. C'est peut-être déjà un des premiers indices de sa flexibilité conceptuelle ou de son caractère polysémique. La flexibilité n'est pas moins floue. Elle renvoie à des qualités diversifiées : incassable, adaptable, extensible, excédentaire et docile. Elle présente aussi une proximité sémantique avec l'élasticité, le pluralisme, la liquidité, l'incertitude, voire la solubilité.Outre le clin d'oil adressé au « Flexible droit » de Jean Carbonnier, le choix de réunir ces deux notions repose sur une hypothèse : les sanctions juridiques pourraient bien être atteintes des symptômes qui affectent les sociétés démocratiques dans lesquelles les institutions s'assouplissent (sans pour autant perdre de leur force), accompagnent les sujets plus qu'elles ne les contraignent, les responsabilisent plus qu'elles ne les sanctionnent verticalement et « inflexiblement ». S'éloignant de l'image du fardeau sur les épaules, alourdissant la démarche, la sanction deviendrait un tuteur pour guider les comportements ou une rampe pour prévenir les excès. Cette hypothèse, suggérant une transformation, ne repose pas pour autant sur une vision angélique, faisant miroiter un quelconque adoucissement de la vie sociale ou des contraintes juridiques. Elle est susceptible de convoquer l'arbitraire, le déficit de sécurité juridique ou l'accroissement du contrôle. Elle est probablement aussi contestable que vérifiable et l'enjeu scientifique de cet ouvrage sera de la mettre à l'épreuve à travers les évolutions de nombreuses branches du droit : pénal, économique, social, privé, public et européen.
Professeur ordinaire à l'École de criminologie de l'Université catholique de Louvain et membre du Centre de recherche interdisciplinaire sur la déviance et la pénalité (CRID&P).