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La famille, même modifiée, recomposée ou éclatée, demeure une institution intangible voire dans certains cas une norme revendiquée par des minorités sexuelles. Comme si restait vrai, en dépit des postures libertines puis libertaires, le principe selon lequel : "il n'est pas bon que l'homme soit seul" (Gen. II, 16).
Ce recours multiséculaire à la famille ne peut-il donc être dépassé ? Giraudoux, que l'on n'attendait pas sur ce terrain, fait de cette interrogation le centre de son oeuvre. Ciment de toute une culture, la famille investit naturellement sa fiction littéraire. Il se charge bientôt d'en faire l'indice d'une qualité de vie en société. Le constat qu'il dresse, avec toutes les nuances, et qui est toujours vérifiable, est désastreux : la famille est bien la référence commune que l'on conforte en la divinisant, en la sacralisant, avant de la récuser dans les faits en la détournant de ses promesses de fidélité, d'amour et de bonheur. En rester là serait une facilité propice aux idéologies radicales, un "famille, je vous hais" gidien, doublé d'une refonte sartrienne de l'individu en actes à poser (- demain, toujours demain). Giraudoux préfère reconsidérer la famille dans ce qui, à ses yeux, transforme le plus la vie : la littérature. Le langage qui lui est propre correspond aux attentes de ceux qui espèrent une heureuse évasion. Les mots ont ce pouvoir d'inaugurer, lorsqu'ils sont saisis par l'imaginaire, une autre destinée... La poétique engendre alors une éthique pour le lecteur qui n'est pas moins homme dès lors qu'il se sent personnage d'une aventure hors de soi. Séduit par une liberté insoupçonnée, affranchi des impératifs sociaux et sans métaphysique aucune, il est prêt, célibataire ou pas, à une empathie féconde en parentés consenties.