L'été du diable

L'Italie, avec ses personnages si prompts au rire ou à la colère, ses paysages sublimes et ses drames secrets, c'est l'univers de prédilection de Jacqueline Dana. Rappelez-vous, Tota Rosa, qui valut à son auteur le Grand Prix R. T. L. 1983. C'est à Pise, en 1945, que se situe l'action de ce nouveau roman. La ville a été libérée par les Alliés. L'immense pinède qui s'étend comme une forêt vierge sur cette côte de la Toscane devient le repère des trafiquants et des fuyards de l'après-guerre.
Son ombre violente s'étend sur une Pise bouillonnante et inquiète. Les soldats envoyés sur le front russe sont morts ou portés disparus. C'est le cas de Luigi le mari de Béatrice, une femme qui travaille à l'hôpital où déferlent les blessés. À vingt-cinq ans, Béatrice vit comme une veuve présumée, avec un beau-père acariâtre, sans le moindre espoir de bonheur, quand soudain elle rencontre Harry. C'est un sergent américain, métis.
La passion qui va les unir n'a rien de conventionnel ; arrachée à un contexte historique sans précédent, elle témoigne non seulement du désarroi dans lequel vivait la jeunesse, mais des dégâts profonds suscités par cette période troublée. Nous n'oublierons pas la petite prostituée napolitaine qui tente de sortir de son enfer en rêvant à l'Amérique ; ni son boy-friend, ce Jimmy : douloureux et paumé, ni Luigi brisé par son combat en Russie.
Ni surtout, cette superbe Béatrice qui, avec panache, choisit son destin. Ces personnages attachants, Jacqueline Dana se penche sur eux avec une passion contagieuse et un souci minutieux du détail juste ou insolite. Son intrigue a l'éclat, la maîtrise et la générosité des grands romans d'évasion.