Jeanne, la jeune Jeanne Vernon, a connu les trop rapides délices d'un printemps qui, comme dit la chanson, fait perdre la tête. Et Jeanne vit désormais... > Lire la suite
Jeanne, la jeune Jeanne Vernon, a connu les trop rapides délices d'un printemps qui, comme dit la chanson, fait perdre la tête. Et Jeanne vit désormais la « promesse » de l'enfant. « Horreur et malédiction ! » clamait, autrefois, le quarteron ranci des médisantes de service. « La belle affaire ! rétorque la vox populi moderne, les temps ont changé, la morale a galopé dans l'optique d'un heureux, d'un nécessaire changement de la législation ! ». Et dans l'euphorie consécutive, le chour, au parterre, de reprendre : « IVG ! IVG ! » sur l'air des lampions triomphants. Lampions expéditifs et libérateurs ! Mais simplistes. Car en dehors du sentier banal fléché vers l'IVG, tout le roman de Jeanne est une longue réflexion naviguant, suivant l'humeur des jours, entre l'abattement et le courage, dans une quête de compréhension, de soutien, d'affection, de tendresse, pour aboutir à un non tranquille à toutes les séduisantes facilités du siècle. Non : l'enfant naîtra. Jeanne assumera ses responsabilités. Seule, puisque l'amant épisodique a cru devoir se dérober. Aussi ce qui pouvait être le beau, le tendre, le palpipant « Voyage de Jeanne au Pays de l'Amour » devient surtout la revendication d'un droit : au-delà de la possibilité d'avorter (qui est une réaction méritoire contre les lois ineptes de 1920), celui de discerner, de réfléchir et, pouvant supprimer l'enfant, comme tout est fait pour y convier, de le garder. Il fallait toute la sensibilité du poète, dont on connaît les écrits et les chauds accents de chanteur, comme toute son orientation fraternelle, pour que Daniel Slimak puisse évoquer avec autant de talent et une fine connaissance de la psychologie féminine, la difficile mais, finalement, très belle aventure de Jeanne. Henri Frossard.