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La conception qu'Emmanuel Kant se faisait des mathématiques était en parfaite consonance avec l'opinion philosophique la plus courante au XVIIIe siècle à l'égard de cette science. Il conviendrait par conséquent de tenir davantage compte de l'histoire des idées scientifiques, ce qui permettrait de faire remarquer que la pensée kantienne relève d'un paradigme scientifique plus ancien, celui de la géométrie euclidienne (où l'image reste intimement articulée au signe), alors que les critiques ordinairement adressées au Kant mathématicien s'appuient indirectement sur l'héritage de la révolution algébrique par lequel le signe est désormais dissocié de l'image.
Il convenait donc d'examiner dans le plus grand détail la manière dont, à travers son ouvre, Kant recevait et discutait les conceptions mathématiques de son temps, et en particulier la tension marquée entre la géométrie et l'arithmétique.
Ce faisant, il redevient possible de recontextualiser le concept kantien d'intuition par rapport aux évidences de son temps, qui ne sont plus tout à fait les nôtres. Les réticences de Kant vis-à-vis des concepts les plus problématiques de l'algèbre se laissent ainsi interpréter à nouveaux frais, faisant ressortir la signification de l'architectonique.
Frank Pierobon enseigne la philosophie à l'Institut des hautes études des communications sociales (Bruxelles).