Faut-il s'étonner que ce journal n'ait pas été écrit plus tôt ? Pour que j'aie le courage de revivre cette période allant de mon arrestation par... > Lire la suite
Faut-il s'étonner que ce journal n'ait pas été écrit plus tôt ? Pour que j'aie le courage de revivre cette période allant de mon arrestation par la Gestapo à ma libération, il m'a fallu attendre que les souffrances endurées s'apaisent. Après une période de flottement, de déceptions, j'ai pu, ayant retrouvé mon équilibre physique et moral, écrire avec un maximum d'objectivité cette histoire vraie. Je n'ai rien voulu prouver ; j'ai essayé seulement de montrer les réactions d'une femme arrachée à celui qu'elle aime, enfermée au secret dans une cellule à Fresnes, déportée à Sarrebrück, Ravensbrück, Neubrandenburg, et fuyant au moment de la débâcle allemande sur les routes d'Allemagne, avant la rencontre avec les Russes, les Américains, les Anglais. Comment ai-je pu tenir jusqu'au bout alors que tant de mes camarades ne purent résister à un régime où tout était conçu pour amener la mort par une lente et cruelle agonie ? À dire vrai, je n'ai jamais désespéré. Peut-être mon métier de comédienne m'a-t-il aidée car, au théâtre, quel que soit l'état physique ou moral dans lequel on se trouve, l'on se doit au public et c'est dans une réaction constante que l'on travaille, que l'on vit. C'est par une réaction constante que j'ai échappé à la mort.