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De la prise de la Bastille au défilé de la Victoire, cent trente années ont été nécessaires pour accorder la France avec la date du 14 juillet. Malgré la Fédération nationale de 1790, le Directoire se méfie du symbole révolutionnaire. Les empereurs préfèrent leur 15 août, les Bourbons restaurent la Saint-Louis, la monarchie de Juillet jongle entre la Bastille et les Trois Glorieuses, la seconde République essaye un 4 mai consensuel : en vain. La grande date survit dans les mémoires. Mais lorsqu'en 1880, les Républicains vainqueurs décrètent la fête nationale du 14 juillet, il faut ruser et contourner. L'incarnation de la République dans la rupture insurrectionnelle entre l'ancienne et la nouvelle France divise. La commémoration disparaît, au profit de la fête militaire et populaire dont les versions parisiennes et provinciales, citadines et paysannes évoquent une Bastille intemporelle et une Révolution sans révolutionnaires. Inutile : la droite monarchiste tente de placer Jeanne d'Arc, la gauche sociale dénonce la fête d'une bourgeoisie repue. Il en est ainsi jusqu'à la Guerre. La Patrie, sacralisée par le sacrifice, prend alors le relais des valeurs de la République. La fête du régime devient la fête de la France. Elle n'est plus contestée, elle est désormais revendiquée.