On croit savoir ce qu'est un fétiche. On se trompe. On ne voit pas que ce terme parle, avant tout, de la métaphysique, du capitalisme et de l'amour.... > Lire la suite
On croit savoir ce qu'est un fétiche. On se trompe. On ne voit pas que ce terme parle, avant tout, de la métaphysique, du capitalisme et de l'amour. Ce sont là ses terrains de prédilection. On ne veut voir, dans l'objet fétiche, que le support de piètres superstitions ou un vague prétexte à polissonneries. On ne veut que réduire ses significations.
Le fétichiste hante les imaginations, mais il déroute la compréhension. On veut bien évoquer les connotations coquines du fétichisme, mais à condition de le priver de la complexité de son objet. On est si réticent à l'égard du fétiche, si réservé qu'on ne le traite qu'avec une condescendance diffuse, pincée, réprobatrice.
Il s'agit plutôt de concevoir, enfin, les significations qui, depuis la seconde moitié du XIXe siècle, donnent au fétichisme valeur de catégorie fondamentale. Il s'agit de saisir comment le mot « fétiche » a acquis ses lettres de noblesse simultanément dans les domaines de l'anthropologie religieuse, de l'économie politique et, bien entendu, de la sexualité humaine. Il s'agit, en somme, de retrouver la source des significations contemporaines du fétichisme, et d'envisager les avatars actuels de l'objet fétiche : leur étude a beaucoup à nous enseigner, pensons-nous, sur la vie que les hommes vivent aujourd'hui. Bref, il s'agit de comprendre comment, à travers l'évolution d'un mot, un savoir se constitue.
J.-M. R.