Chaque siècle, comme chaque homme, a ses exagérations, ses contrastes. Sous ce rapport, nous n'avons rien à envier aux générations qui nous ont précédés,... > Lire la suite
Chaque siècle, comme chaque homme, a ses exagérations, ses contrastes. Sous ce rapport, nous n'avons rien à envier aux générations qui nous ont précédés, et ce serait une étrange histoire que celle des opinions et des idées extrêmes qui ont eu cours dans l'époque troublée où nous vivons. Le peuple qui tuait son roi, qui proscrivait son Dieu, il y a tantôt cinquante ans, s'est agenouillé devant les autels qu'il avait brisés naguère. C'est là, à part l'imprescriptible puissance du sentiment religieux, une loi éternelle des choses de ce monde, un reflux inévitable qui nous ramène toujours au point que nous avons quitté, pour nous emporter de nouveau et nous y ramener encore. L'outrage révolutionnaire, en tombant sur les choses saintes, avait préparé une réaction religieuse, comme le régicide avait préparé une restauration. L'église de France eut bientôt cicatrisé ses plaies : de grands esprits, de grands écrivains se rallièrent là cause du catholicisme et la défendirent, les uns par la logique, les autres par la poésie, Dieu fut, pour ainsi dire, rappelé de l'exil. À l'origine même du siècle, le point de départ de l'ère nouvelle du catholicisme est marqué dans la politique par le concordat de 1801, dans la littérature par le Génie du christianisme, qui parut un an après le concordat. Retardé sous la restauration par l'appui même que lui prêtait le pouvoir, dans l'intérêt d'une politique qui se rejetait vers le passé, le mouvement religieux a pris, depuis 1830, un développement nouveau. On sait l'affluence qui se porte aux églises dans les grandes solennités, l'empressement du public à suivre les prédictions des orateurs chrétiens, le succès des cours de la faculté de théologie, et, s'il convient de faire une assez large part à la curiosité de la foule, il est juste aussi de reconnaître qu'auprès des oisifs et des curieux il y a les chrétiens sincères. Sans aucun doute, il faut attribuer la cause principale de ce mouvement à la séparation de la religion et de la politique opérée par la révolution de juillet, à la pensée, encourageante pour la foi sérieuse, que la liberté de conscience était acquise, et que le pouvoir ne spéculerait plus sur les croyances.