À partir du milieu du XIXe siècle, la psychiatrie occidentale a nosographié par le menu les déviances sexuelles dont certaines entamèrent leur lente... > Lire la suite
À partir du milieu du XIXe siècle, la psychiatrie occidentale a nosographié par le menu les déviances sexuelles dont certaines entamèrent leur lente démédicalisation après les Années folles, notamment sous l'influence de la littérature et suivant les évolutions d'un système juridique imprégné de censure morale. La pathologisation de certains comportements sexuels coïncida avec la reprise en main de l'ordre moral par le Pouvoir et l'Église. A compter des années 1850, les délits et crimes liés à la sexualité occupèrent couramment l'activité judiciaire ; les psychiatres, pour la plupart experts auprès des tribunaux, exploitèrent donc leur nosographie contestable des perversions sexuelles dans leurs rapports d'expertise légale. Ces experts n'ont pas échappé à la fureur polygraphique qui caractérise l'époque. L'accessibilité de ces textes, études et rapports, naguère confidentiels, favorise le regard pluridisciplinaire nécessaire pour répondre aux questionnements suscités par ce corpus étonnant. Les contributions présentées dans ce numéro de Droit et Cultures essaient ainsi, en éclairant certains aspects de la problématique sur le plan juridique, médical, littéraire et, plus globalement, sociétal, d'en relever quelques-uns. Outre le constat de la pathologisation outrancière des comportements sexuels hors la norme, elles conduisent à s'interroger sur la scientificité des expertises comme sur la juridicité des solutions données. L'étude de la psychiatrie légale de ces années-là, à la fois si lointaine et si proche, permettrait-elle alors de comprendre les enjeux et les limites de celle d'aujourd'hui ?