Entre la douleur du deuil et la nécessaire découverte de la sexualité, l'adolescence de l'héroïne se révèle être une période unique. Texte d'autofiction, « cette promenade sinueuse et hâtive dans les chairs d'une jeune femme aux abois », raconte avec fraîcheur et naïveté les tribulations d'une adolescente qui a grandi dans le Perche au sein d'un lotissement pavillonnaire. L'essentiel du récit se déroule au cour d'un chef-lieu de canton rural, où son père est cantonnier, sa mère femme de ménage.
L'année de ses quatorze ans, tout bascule : son frère meurt ; elle découvre les strass de la Côte d'Azur. Entre humour et violence, dans un style acéré, la narratrice relate un deuil impossible, la déflagration d'une cellule familiale, mais aussi l'apprentissage sauvage du sexe et de la politique. Malgré les années S. I. D. A, la jeune fille explore des corps à corps de plus en plus tordus affectivement et sexuellement.
Elle affronte aussi et tente d'assumer sa condition de prolétaire provinciale en jouant toutes les gammes émotionnelles et charnelles d'une partition que seule l'adolescence autorise. Entre souffrance et curiosité littéraire, parviendra-t-elle à conjurer l'ordalie qui caractérise sa jeunesse ? Découvrez, au travers d'une autofiction originale, le récit d'une jeune fille qui découvre la sexualité en même temps que les déchirures d'une famille en deuil.
EXTRAITCet été-là, j'ai quatorze ans et tout bascule. Je séjourne à Grasse chez tata Gertrude et oncle Smirnoff. Ils ont la gentillesse de m'accueillir dans leur pavillon de location qu'ils appellent villa. De ma Normandie natale, j'imaginais une maison énorme, une piscine et des palmiers. C'était sans compter sur l'univers de tata Gertrude, spécialiste de la double vie. La sienne ne lui suffit pas, alors elle s'arrange avec son passé, gomme ses origines et se soustrait à la réalité.
Pour entretenir un bronzage permanent, tata Gertrude s'expose sans crainte au soleil et se dandine en string le plus souvent possible. La nocivité des rayons U. V ne l'atteint pas. Tata Gertrude, il faut l'imaginer revenir dans sa ferme natale, les cheveux blonds bouclés à la Polnareff, le teint hâlé de Dalida, vêtue de cuir, toute son élégance juchée sur des talons-aiguilles, au bras d'un ami qui a traversé la France pour lui permettre de revoir sa famille.
Une fois sur deux, l'ami est un amant qui renouvelle sa garde-robe. C'est pourquoi chaque année, elle se déleste de vêtements dont elle nous fait cadeau dans une valise aux allures de coffre-fort. Tailleurs, bustiers, jupes, pantalons en cuir, chemisiers en dentelle, mais aussi bijoux en or ornés de saphir, d'émeraude ou de rubis, ce butin nous fait oublier Eram et Pantashop.À PROPOS DE L'AUTEURSarah Poulain est née en 1973 dans le Perche, où elle a choisi de rester vivre.
Auteure de nouvelles, amatrice d'ateliers d'écriture et animatrice de cafés-littéraires, Belle de vie est son premier roman, après la participation en 2017 au roman collectif Le dernier voyage du Lancastria.