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Alors que la guerre fait encore rage en Syrie et que les sociétés de la rive sud de la Méditerranée hésitent entre protestation ouverte et crainte de la violence d'État, il importe de saisir la place qu'occupent les morts de guerre dans ces pays du Proche et du Moyen-Orient, où ils paraissent si intimement liés à la culture politique. À chaque fois, ici comme ailleurs, que ce soit lors d'assassinats politiques, lors de massacres accompagnant une guerre civile ou sur des champs de bataille, il faut que les morts de guerre fassent sens, pour que leur potentiel de destruction soit affaibli. C'est pourquoi ils sont si importants à étudier pour comprendre ces sociétés car ils nous informent sur la fabrique du social, sur ses dynamiques de cohésion comme sur les tensions qui la traversent, notamment à l'occasion des processus de construction mémorielle dont ils sont l'objet. Beaucoup de ces morts sont des civils ; tous sont dits « martyrs ». L'omniprésence de cette figure confère aux morts de guerre une charge de sacralité religieuse qui les rattache à des univers symboliques nourris d'imaginaires religieux, ici essentiellement sunnite mais aussi chiite ou chrétien. Il importe de les regarder de près pour saisir l'épaisseur historique de ces constructions ainsi que leur intense imbrication avec les processus sociaux et politiques en cours.